Parfois les souvenirs vous jaillissent à la gueule. Parfois même, ils sont récurrent. Pourtant ma mémoire ressemble à un château en ruine, globalement je me rappelle de bien peu de choses avant quinze ans. Anne est parfois récurrente, sans doute parce que j’étais déjà un poil plus âgé.

Quelque part en 2006 j’ai gagné un concours. Le très pompeux prix Guy Maupassant de la jeune nouvelle organisé chaque année par l’AMOPA; pour un texte que j’avais rédigé en l’espace de deux heures en cours. Je me souviens que c’était sorti tout seul, qu’à aucun moment quasiment je n’ai eu à devoir réfléchir. Pour le coup l’expression « pisser des lignes » prenait tout son sens. Une sorte de transe qui n’a eu pour effet que de me paralyser au moment de rendre mon travail, pensant m’être totalement écarté de ce qui était attendu du devoir.

Quelques semaine plus tard on me rendait le devoir noté d’un superbe 18/20, première surprise. La seconde étant que ma professeure me proposait de participer au dit concours. Quelques mois plus tard encore me voilà convié à l’évènement, principalement peuplé de professeurs, de vieux professeurs et de parents. L’on me remit un papier dont l’impression et la mise en page laissait transparaitre l’âge moyen et le budget de l’association. Entre deux félicitations et quelques « ça fera bien sur le CV » je comprenais que je n’avais aucune envie d’être là. Néanmoins fier, j’en parlais sur mon blog de l’époque, Le Réverbère, alors nettement plus nourris de mes errements adolescents qu’aujourd’hui. C’est alors que Anne apparu.

D’abord en commentaires de mon blog, puis par mail, nous échangions sur ce fameux concours auquel elle avait elle aussi participé, puis par la suite de nous, nos envies, nos rêves, nos ambitions. Autant le dire, je suis nul pour ce qui est de garder contact avec les gens. Parfois je me noie dans une idée, un projet, des envies ou des gens, en somme je me noie dans la vie et ses nuances et ne garde pas contact, quand bien même je me dis qu’il faudrait que j’écrive à telle ou telle personne. Puis après je me dit que ça fait trop lontemps, qu’il est trop tard, alors je n’y pense plus et plus tard je regrette.

Le plus tard c’est là. Parfois je me suis demandé ce que Anne était devenue. Quelques fois j’ai cherché sans jamais la retrouver, une fois j’ai répondu à cette adresse @voila.fr, le dernier mail resté sans réponse, avec pour seul écho un robot m’indiquant que mon mail n’avait pu être remis. Ces échanges n’ont durés que deux mois, et pourtant je regrette un peu qu’ils n’aient pas continués plus.

Lors d’une énième recherche tardive j’ai fini par la retrouver. Elle travaille pour un conglomérat qui possède entre autres WC Net ou encore la colle au tube jaune. Bien qu’elle ne travaille pas pour ces marques, je dois avouer que ça m’a fait sourire. Ni elle qui souhaitait devenir romancière ni moi qui souhaitais devenir scénariste n’écrivons au final. Et c’est peut-être ce qui est un peu triste, que nos rêves d’ados se soient mués en quelque chose de bien plus banal. Inutile de dire que je n’ai pas cherché à la recontacter, cela aurait été bien trop flippant. Visiter son profil et la voir visiter le mien a été largement suffisant; sans doute qu’elle ne se rappelle en rien de moi.